L'établissement de bonnes relations entre les travailleurs et la direction est essentiel à l'amélioration des conditions de travail dans l'usine de Maliban en Jordanie, où un comité actif de travailleurs et de direction est à l'origine du changement.
5 août 2014
Ad-Dylayl, JORDANIE - Lorsque les ouvrières de l'usine de confection Maliban ont fait part de leurs préoccupations concernant la sécurité lorsqu'elles quittaient l'usine et se rendaient à leurs dortoirs la nuit, les responsables de l'usine ont écouté patiemment, posé des questions, discuté des options possibles. Ensuite, ils ont fait quelque chose qui n'arrive pas toujours : ils ont agi, et vite.
"Maintenant, nous avons des lumières et deux agents de sécurité sur le chemin des dortoirs", dit M.G.M. Senarathna, 33 ans, "et il leur a fallu moins de 30 jours pour le faire".
Selon les dirigeants et les travailleurs, cette réactivité est le fruit de la relation solide établie par une plateforme de résolution collective des problèmes mise en place par l'usine. Elle est apparue trois ans après l'adhésion au programme de services consultatifs de Better Work, en 2008. Appelés "comités consultatifs pour l'amélioration des performances" (PICC), ces groupes de travail se composent de 8 à 10 représentants élus des cadres et des travailleurs, en nombre égal, et sont chargés d'élaborer et de mettre en œuvre des plans d'action pour l'amélioration après qu'une usine a été évaluée par Better Work sur le plan du respect des normes et des lois du travail.
Dans un secteur où la direction et les travailleurs se méprennent régulièrement et ne s'entendent souvent pas, les PICC offrent un espace sûr et neutre où les deux parties peuvent exprimer leurs préoccupations et travailler ensemble à la recherche de solutions. Les PICC ont été salués par les dirigeants et les travailleurs, ainsi que par les gouvernements, les donateurs et les marques internationales, comme l'un des outils les plus importants pour aider les usines non seulement à lutter contre les violations du droit du travail, mais aussi à rester sur la voie de l'amélioration. Ils fonctionnent parce que les réunions rassemblent des parties prenantes traditionnellement divergentes autour d'une table pour leur donner l'occasion d'avoir un dialogue honnête.
Cette possibilité de s'exprimer et d'être entendu est poussée encore plus loin chez Maliban, où l'adhésion au PICC reflète la diversité de l'usine. La majorité des travailleurs de Maliban étant des migrants originaires des pays voisins, la langue peut souvent constituer un obstacle important à la capacité des travailleurs à faire connaître leurs besoins. Cependant, une réunion typique du PICC de Maliban implique souvent une traduction en plusieurs langues et une représentation de chacun des groupes ethniques employés dans l'usine. Malgré les différences culturelles, les travailleurs de diverses nationalités se défendent les uns les autres. Bien que les barrières linguistiques restent un défi, l'usine s'efforce constamment d'améliorer la communication avec les travailleurs.
"Ce qui est remarquable, c'est qu'au début, les représentants du PICC ne parlaient qu'au nom des travailleurs de leur propre nationalité", explique Shakir Mohammed Esmayeel, directeur général d'EAM Maliban, "Aujourd'hui, les problèmes sont soulevés par les membres, quelle que soit la nationalité concernée. Les membres jordaniens du PICC essaient d'aider les travailleurs bangladais, par exemple.
Cet engagement à écouter tous les travailleurs a contribué à créer le type de confiance qui, selon les travailleurs, devient la base de la loyauté. De plus, le PICC de Maliban a réussi à résoudre des problèmes sur le lieu de travail parce qu'il s'agit d'une ligne directe avec la direction, ce qui signifie une assurance supplémentaire que leurs problèmes seront entendus et traités.
"Ce qui est formidable avec le PICC, c'est que les problèmes des travailleurs sont portés à la connaissance de la direction et pas seulement des cadres moyens", explique Um Hazem, 41 ans, travailleur et membre du PICC, "Le directeur général assiste à chaque réunion et nous lui parlons directement. Le directeur général assiste à toutes les réunions et nous lui parlons directement. Cela nous a donné une grande confiance en nous et nous a permis d'aller au-devant des gens.
Les responsables de Maliban affirment que les PICC ont encouragé tout le monde dans l'enceinte de l'usine à travailler ensemble pour que l'usine reste sur la voie de l'amélioration constante. Le succès du comité repose sur le fait que chaque réunion mensuelle commence par un tour d'horizon des changements qui ont été effectués ou non depuis la réunion précédente.
"Nous examinons le procès-verbal de la réunion précédente et, dans 90 % des cas, les problèmes sont réglés avant la réunion suivante", explique M. Esmayeel.
La communication avec les travailleurs et la clarté des attentes ont joué un rôle essentiel dans l'établissement et le maintien de relations solides entre les cadres et les employés, ce qui a permis d'éviter des crises et des conflits majeurs à l'avenir, explique M. Esmayeel.
"Nous travaillons sur une base réaliste", ajoute-t-il. "Si les travailleurs demandent des choses irréalisables, nous leur disons immédiatement que ce n'est pas possible. Nous ne disons pas que nous allons étudier la question si ce n'est pas le cas. Ils le comprennent parce qu'ils nous font confiance. Si nous sommes d'accord, les choses se feront".
Comme l'éclairage des allées entre l'usine et les dortoirs. Un nouveau menu a été proposé à la cantine à la suite de plaintes concernant des repas insatisfaisants. Et l'amélioration de la propreté des salles de bains. Ce sont de petites choses, disent les travailleurs, mais des problèmes qui peuvent s'aggraver avec le temps et éroder rapidement la confiance et la loyauté des travailleurs s'ils ne sont pas résolus.
Selon les travailleurs, cela rend moins urgentes les questions plus importantes, telles qu'une demande d'augmentation des salaires par rapport à ce que Maliban accorde déjà en vertu du droit du travail. Le plus important, selon eux, est que leur voix soit non seulement entendue, mais aussi que leur opinion soit prise en compte.
Les PICC jouent également un rôle en soutenant les syndicats et en collaborant avec eux plutôt qu'en se substituant à eux. Lorsque des syndicats sont présents dans les usines, les représentants des travailleurs sont invités par le syndicat à siéger au sein du PICC.
"Le PICC nous a permis de mieux nous faire entendre", explique Hazem. "La direction nous accorde désormais plus d'attention et tient compte de nos demandes. Ils nous respectent, en particulier nous, les femmes jordaniennes".
Les cadres apprécient également le rôle que jouent les PICC dans le renforcement des relations entre les cadres et les travailleurs, afin que l'usine puisse prospérer dans un secteur compétitif.
"Nous sommes convaincus qu'une main-d'œuvre heureuse et motivée ne peut qu'offrir un meilleur produit à l'usine et aux acheteurs", conclut Esmayee.