À l'usine de confection Zhen Tai de Phnom Penh, au milieu des conversations entre les travailleurs, les syndicats et la direction de l'usine, est assise Sophea, une femme qui a travaillé dans les ressources humaines tout au long de ses 21 ans de carrière et qui est aujourd'hui directrice générale de Zhen Tai.
Dans le cadre de son travail, elle a dû développer une grande capacité d'écoute afin d'équilibrer des intérêts divergents. Certes, ce défi n'a pas toujours été facile à relever. Lors d'un entretien avec Better Factories Cambodia, elle a réfléchi à son poste et a admis : "Mes interactions avec les travailleurs ont eu leur part de difficultés dans le passé. Il m'arrivait d'être dure avec les travailleurs et j'avais souvent des conflits avec les employés du syndicat qui, selon moi, ne prenaient pas les considérations des travailleurs au sérieux. C'était particulièrement vrai en ce qui concerne la démission des travailleuses après leur accouchement".
Récemment, Sophea a commencé à adopter une approche plus douce et à écouter attentivement les travailleurs, une évolution qu'elle attribue en partie à un programme de formation de trois jours intitulé "Female Leadership", dispensé par Better Factories Cambodia. Ce programme vise à renforcer les compétences des comités consultatifs pour l'amélioration des performances (PICC), qui sont des comités d'usine cherchant à résoudre et à améliorer les relations entre les représentants des travailleurs et la direction de l'usine par le biais de techniques de dialogue social efficaces. La formation encourage et prépare les membres des PICC à mieux représenter les travailleuses et à mieux communiquer avec elles, ainsi qu'à contribuer individuellement et collectivement à l'autonomisation des travailleuses dans leurs usines. Sophea faisait partie des 70 femmes de 19 usines différentes qui ont participé à la formation.
Elle a commencé à comprendre que de nombreuses ouvrières démissionnaient pour s'occuper de leur nouveau-né, ou en raison de problèmes personnels ou de conflits avec leurs supérieurs, et en écoutant les voix des ouvrières, elle a appris à identifier les raisons de cette situation. Grâce à cette expérience, Sophea a commencé à être plus proactive en offrant des conseils et un soutien aux travailleuses, et en proposant finalement des changements dans l'usine.
Lorsqu'on lui demande ce qu'elle a retenu du programme, Sophea mentionne l'importance de l'égalité des chances en matière d'emploi, y compris de salaire, et de la mise en place d'une politique permettant aux femmes enceintes de partir 15 minutes plus tôt que les autres travailleurs et leur offrant une pause d'une heure à la crèche. Selon elle, cela peut faire une grande différence pour l'enfant et la mère.
Elle a également invité les autres parties prenantes, notamment les représentants des syndicats et des travailleurs et les chefs d'équipe, à participer au programme de formation.
"Il y a un an, je pensais que tant que tout le monde avait un emploi, il n'était pas nécessaire de se pencher sur la question du genre ou des droits de la femme. Mais après la fin du programme et en revenant à l'usine, en tant que femme, je me suis rendu compte que je ne m'étais jamais mise à leur place et que je n'avais jamais pris le temps de comprendre la pression et les préoccupations auxquelles mes collègues ouvrières sont confrontées", a déclaré Sophea.
Elle a noté qu'étant donné qu'une partie du programme de formation encourage les travailleurs à s'exprimer davantage et à participer à la prise de décision au sein de leur propre famille, il pourrait jouer un rôle important pour toutes les femmes qui travaillent dans les usines. Elle se considère aujourd'hui comme une défenseuse des droits des travailleurs et de l'égalité des sexes, mais ajoute que le travail n'est pas encore terminé et qu'il reste encore beaucoup à faire.